Intervention de Marie Dauchy – 30 juin 2022
Rapport n° 6775
En Assemblée plénière auvergnate et rhônalpine du 30 juin 2022, Marie Dauchy est intervenue sur le projet régional des mobilités dans la décennie à venir :
Monsieur le président, chers collègues.
Ce rapport que vous nous soumettez aujourd’hui, comporte deux points.
Le premier traite des mesures à mettre en œuvre pour permettre l’attribution directe du contrat d’exploitation du service public régional de voyageurs, à la SNCF, pour une dizaine d’années.
Nous ne voyons évidemment aucun souci à ce que la SNCF transporte des voyageurs sur les lignes TER de notre région, et cela le plus longtemps possible. C’est même ce qui nous semble le plus naturel.
Mais il faut préciser que si nous nous retrouvons à devoir nous prononcer sur ce rapport, pour permettre ce qui devrait aller de soi, c’est qu’une mauvaise décision a été prise en amont.
En effet, le « Nouveau Pacte Ferroviaire » voté par la LOI n° 2018-515 du 27 juin 2018, impose le dogme de l’ouverture à la concurrence au rail français. Ainsi, ce Pacte prévoit que les Régions ont, dès la fin du mois de décembre 2023, l’obligation de lancer des appels d’offres à échéance de leurs actuels contrats d’exploitation.
Vous semblez vouloir vous éviter cette peine. Et vous avez bien raison.
Il suffit pour s’en convaincre, de regarder nos voisins britanniques faire marche arrière sur la privatisation thatchérienne de leur transport ferroviaire, tant ses résultats furent désastreux : Détérioration de l’état des lignes mettant en danger les usagers, augmentation folle du prix des billets avec en parallèle des réductions de personnels pour tirer les coûts vers le bas afin de maximiser les profits, mauvaises conditions de travail conduisant à des grèves incessantes etc..
Et c’est le chemin que souhaite nous faire prendre la Macronie, avec malheureusement l’assistance de votre famille politique car nombreux sont les parlementaires LR à avoir approuvé ce texte qui nous met dans cette situation. A titre d’exemple 74 députés « LR » sur les 102 présents ont voté en sa faveur à l’Assemblée nationale en juin 2018, quand tous les députés RN présents ont évidemment voté contre. Parce qu’ouvrir à la concurrence l’exploitation d’infrastructures aussi essentielles pour le fonctionnement de notre pays, revient assez souvent sur le long terme, à collectiviser les pertes et à privatiser les profits.
Ainsi, nous aurions apprécié voter en faveur de cette proposition visant à repousser les conséquences des mauvaises décisions à laquelle vous avez participé. Mais le reste de votre rapport ne nous le permet pas, puisque nous sommes ici en face d’une application néfaste de la loi 3DS qui a pour vocation de permettre une adaptation du droit aux spécificités locales (d’où la différenciation), de renforcer les compétences des institutions locales (d’où la décentralisation) et de soulager les institutions nationales (d’où la déconcentration).
Elle ne porte pas seulement sur les transports, mais plus globalement sur l’aménagement du territoire, et implique une clause référendaire (participation citoyenne locale).
Vous nous proposez donc dans le cadre de celle-ci, de bénéficier à titre d’expérimentation, de la mise à disposition de routes nationales non concédées, accompagnée du transfert de la maitrise d’ouvrage pour les opérations d’aménagement les concernant.
Mais il faut rappeler que 2.000 km des 12.000 km de routes non concédées sont actuellement gravement endommagées selon un audit externe réalisé pour le compte du ministère des Transports et dont une synthèse a été rendu publique le 10 juillet 2021.
Sans vouloir voir le mal partout, la prudence nous oblige à nous demander s’il ne s’agit pas là pour l’Etat d’un moyen de céder l’air de rien une charge qu’il n’aurait plus les moyens d’assumer aux départements et aux régions.
Certes, la loi 3DS impose bien une compensation financière à l’Etat mais avez-vous des éléments vous permettant de nous assurer que celle-ci sera, et surtout restera, suffisante pour assumer cette nouvelle charge ?
Vu la période inflationniste que nous connaissons, il serait hasardeux de n’envisager toucher en compensation qu’une somme fixe, qui n’aurait pas vocation à évoluer elle aussi.
Mais si vous pouvez nous donner cette garantie, l’on pourra convenir qu’il s’agit là d’un bon rapport qui nous donnera en effet les moyens d’agir plus efficacement au service des Auvergnats et des Rhônalpins.
Toutefois, nous ne pouvons que nous opposer à cette demande que vous nous faites de déléguer à la Commission Permanente la totale gestion de ces deux projets.
Raison pour laquelle, même si nous approuvons pour les raisons évoquées, le principe d’attribution directe d’un contrat avec la « SNCF Voyageurs » pour l’ensemble des lignes du réseau TER Auvergne-Rhône-Alpes, et même si nous attendons avec intérêt les informations sollicitées dans le cadre du second point ici abordé, nous sommes contraints de nous abstenir lors du vote de ce rapport.