Rapport n° 5898
Intervention d’Andréa Kotarac – 14 octobre 2021
En Assemblée plénière auvergnate et rhônalpine du 14 octobre 2021, Andréa Kotarac a critiqué les incohérences dans les orientations budgétaires 2022 de l’Exécutif de Laurent Wauquiez (LR) :
Monsieur le Président, mes chers collègues,
Fils d’un ouvrier du bâtiment, et en lisant les orientations budgétaires des LR relatifs à notre collectivité, j’ai cherché la définition maçonnique du ravalement de façades : « travail consistant à remettre à neuf le parement d’un ouvrage de maçonnerie en procédant de haut en bas. Le ravalement de façade demande des outils précis et un savoir-faire. »
Inutile de vous dire que vous avez ce savoir-faire politique de ravalement.
Alors oui, il y a le côté budgétaire, une capacité de désendettement très bonne, une épargne brute excellente en comparaison aux autres Régions et ce, dans un contexte difficile et imprévisible. Oui, la santé budgétaire de notre collectivité est bonne, oui, mais pour quoi faire politiquement ?
Mais ce débat d’orientation budgétaire, comme vous le savez, est en réalité un débat d’orientation politique ; c’est un choix de vérité, un débat de cohérence générale des partis, notamment dans leurs votes du Parlement européen, jusqu’aux intercommunalités et aux communes.
Sur le fond budgétaire :
Il est absurde de générer autant d’épargne brute car, cela a été dit, épargner autant coûte plus cher que d’emprunter à taux zéro. N’est-il pas plus utile de rendre aux habitants cet argent en investissant dans la continuité des lignes ferroviaires ou dans la réhabilitation des lycées qui s’effondrent ?
Ma première interrogation concerne les investissements. Lors du précédent débat, je me souviens, il y avait quelques tours de passe-passe de la majorité Wauquiez. Notamment celle d’intégrer la somme des prêts garantis par la Région dans la colonne des investissements faits par la collectivité. Pourtant, aucun centime ne sort des caisses de la Région pour un investissement direct. Il s’agit-là simplement pour la Région d’être garant d’un prêt.
Sur ces garanties de prêt, comme vous le savez, notre pays s’est doublement endetté durant la crise sanitaire. D’abord vis-à-vis de l’extérieur, notamment de l’UE, à travers des négociations où la France contribuera davantage au plan de relance de l’UE qu’elle ne recevra de cette même institution. Mais notre pays s’est aussi endetté vis-à-vis de l’intérieur, à travers ces garanties de prêts que beaucoup d’entreprises ne pourront plus rembourser. Il s’agit là de ma première interrogation : combien de prêts garantissons-nous en ce moment et quelle est la part de prêts qui ne pourront être remboursés ?
Pouvons-nous utiliser cet outil, ce thermomètre économique que sont ces prêts non honorés, notamment à travers la Commission Economie, pour géolocaliser les entreprises qui battent de l’aile, afin de permettre de passer ce cap et de garantir la vie pour nos emplois et pour nos territoires ?
Nous pourrons débattre de finances publiques ou de comptabilité publique, mais je m’attacherai aux choix politiques pour cette intervention.
Trois priorités sont donc fixées par la majorité, et je suis en accord totale avec ses priorités : santé, sécurité, et relocalisations des activités.
Le problème est que ces priorités sont fixées par le parti les Républicains. Et ces trois thématiques sont les filles orphelines de ce parti.
La situation nationale, et en conséquence de notre collectivité, ne serait pas celle qu’elle est si Xavier Bertrand n’avait pas été ministre de la santé marquant l’avènement de la libération du secteur de la santé, si Nicolas Sarkozy avait eu un kärcher qui fonctionnait mal en matière de sécurité ou si les LR, le PS et EELV n’avaient pas été main dans la main pour trahir le peuple français en forçant l’adoption du Traité de Lisbonne qui valide et grave dans le marbre le marché unique, la libre circulation des capitaux et les délocalisations.
Ce double-langage se poursuit encore, puisque Bruno Le Maire, votre candidat chéri, n’a tenu que 51 heures dans le costume d’un souverainiste défendant les intérêts de la France : la relocalisation et la protection de nos emplois locaux, ceci pour finir par demander à la Pologne de suivre au pas la Commission Européenne ou de quitter l’UE.
A l’exception peut-être de la FI et du PCF qui avaient défendu le « Non » en 2005 et en 2009, vous avez tous beau jeu ici de défendre les relocalisations de notre Région, les emplois locaux et la défense du savoir-faire français car vos choix nationaux et européens ont conduit à abattre les frontières entre les états.
Grâce à vous, les ¾ des délocalisations subies par la France s’opèrent au sein même de l’Union européenne.
Ces choix, vos choix, nous conduisent aujourd’hui à nous abaisser à des « chartes », une charte de préférence régionale car nous sommes dépourvus de tout pouvoir et autorité pour favoriser nos entreprises locales dans les appels d’offres. L’exemple de la clause « Molière » demandant de parler français sur les chantiers et donc de favoriser nos entreprises n’a même pas été accepté par les tribunaux en raison de la sacro-sainte concurrence libre et non-faussée, issue là encore des traités européens que vous avez acceptés.
Les chartes ne fonctionnent pas, tant en matière économique que dans les autres domaines. La charte de la laïcité du ministre Vincent Peillon à l’entrée des lycées n’a pas empêché des années après la décapitation de Samuel Paty ; la charte de Madame Schiappa sur les valeurs de la République n’a pas empêché le clientélisme, n’a pas empêché l’islamisme d’avancer et d’être subventionné.
Ce qu’il nous faut, ce ne sont pas des chartes mais des contrats, des conventions, une conditionnalité des aides faites aux entreprises, des contreparties, pas des chartes qui ne seront pas respectées. Ce rapport est un bon rapport mais il n’a aucun sens si vos partis votent le contraire à l’échelle européenne et nationale.
Comment se fait-il que des LR votent ici pour la relocalisation quand dans le même temps vos députés européens refusent les amendements du RN qui, eux, privilégient nos intérêts nationaux, régionaux et la priorité de nos entreprises françaises dans les appels d’offre vis-à-vis d’autres entreprises européennes ou même extra-européennes, c’est-à-dire principalement chinoises ?
Vous ne pouvez pas faire preuve d’orientations politiques et budgétaires dignes de pompiers régionaux quand dans le même temps vos camarades allument des feux à l’échelle européenne qui tuent nos activités, nos emplois, notre savoir-faire et nos territoires.
Ces votes à l’échelle européenne et nationale ont une conséquence directe sur l’activité économique de notre région. Les positions pro-américaines des amis de Madame Gerbert ne changeront rien aux rachats de nos entreprises stratégiques comme Alstom hydroélectrique en Isère et au risque de disparition de ses 11 000 sous-traitants locaux.
Ces sujets sont d’une importance notable car ils m’interrogent sur le positionnement de certains. Jean-Baptiste Baud, élu socialiste présent dans cette assemblée, proche d’Arnaud Montebourg et de la Remontada qui s’est battu pour défendre cette entreprise stratégique, siège aux côtés de Najat Vallaud-Belkacem, ministre du gouvernement qui a vendu cette entreprise aux Américains. Madame Marche, vous qui êtes tant battu pour défendre l’entreprise « Ecopla », unique fabricant de Barquette en Aluminium et leader européen racheté frauduleusement par son concurrent italien, comment pouvez-vous siéger aux côtés d’EELV, parti fédéraliste européen qui favorisent la désindustrialisation de nos territoires par les règles libérales européenne ?
Le temps est venu de défendre nos territoires et d’assurer une cohérence générale entre nous et au sein de nos partis, afin d’opérer des débats transparents, de refuser l’acceptation des traités de libre-échanges qui tuent notre système de protection sociales, qui tuent nos artisans et nos commerçants ou nos éleveurs. Vous les défenseurs de la France, vous êtes les bienvenus autour de Marine pour créer la rupture avec les gouvernements mondialistes qui ont bradés la France, nos territoires et nos régions.
Vous l’avez vu à Cournon, M. le président, nos éleveurs, nos agriculteurs comprennent les règles agro-sanitaires leur permettant de produire des matières naturelles saines, mais ils ne comprennent pas qu’on puisse les mettre en concurrence avec des pays qui ne respectent aucune règle sociale sanitaire et écrasent les marchés mondiaux de l’agriculture et d’élevage.
Je ne dis pas que nous ne pouvons pas agir, dans le domaine du tourisme, dans le thermalisme, de l’artisanat, et Dieu sait si nos métiers manuels ou du luxe ont un sens dans la mesure où nos communes et nos territoires disposent déjà d’une marque, d’une identité et d’un savoir-faire.
Nous serons à votre disposition pour défendre nos emplois, nos territoires et la relocalisation des activités.
Ce rapport propose de prendre acte du débat. J’en prends acte car c’est une obligation légale. Mais vous comprendrez bien qu’en l’état actuel nous ne pouvons accepter ces orientations en faisant fi de vos positions européennes et nationales.
Je vous remercie.