Intervention de Muriel Burgaz – 12 octobre 2018
Rapport n° 2155
En Assemblée plénière auvergnate et rhônalpine du 12 octobre 2018, Muriel Burgaz a évoqué les forces et les faiblesses du plan régional emploi-formation :
Monsieur le président, chers collègues,
3 réflexions :
La 1ère :
N’y a-t-il pas une contradiction entre l’objectif de se recentrer sur des formations pour les filières dynamiques qui ont du mal à recruter (le numérique, le tourisme, l’énergie durable,…) et la cible prioritaire retenue : les publics fragilisés ?
Effectivement le chômage frappe davantage les personnes peu ou non qualifiées. Plus de la moitié des demandeurs d’emploi n’ont pas le niveau du baccalauréat.
Comment votre objectif principal de financer l’accès à l’emploi peut-il être rempli si les formations ne servent qu’essentiellement à remplir des missions de remises à niveau, d’apprentissages des savoirs de base…, certes absolument nécessaires mais qui ne sont pas de la compétence de la Région mais de celle de l’état et de l’éducation nationale qui ne font pas leur travail !
En fait, l’ensemble du système français de formation professionnelle a été principalement conçu pour les salariés mais n’est pas adapté aux demandeurs d’emplois. Pour les demandeurs d’emploi, elle est plus employée en fait comme une solution aux difficultés sociales que pour l’acquisition de compétences spécifiques dans un objectif d’emploi.
2ème réflexion :
Pour que cette politique régionale fonctionne, le dialogue entre la région et Pôle emploi est décisif. Et pourtant ce dialogue ne fonctionne pas. Principal opérateur de la politique de l’emploi, Pôle Emploi est un financeur très important des formations aux demandeurs d’emploi, mais il les oriente en même temps vers des stages financés par les régions, ceci sans critères ni stratégie vraiment définis. Et très souvent d’ailleurs sans participer lui-même au co-financement et en demandant à la Région de s’engager à 100 %.
Les stratégies d’achat entre les 2 ne sont pas coordonnées.
Et puis comment peut-on parler de Convention et de partenariat efficace, quand Pôle Emploi, qui va toucher 60 millions d’euros à dépenser d’ici la fin de l’année pour les demandes de formation, refuse d’aider la Région à financer les demandes qui restent sur le carreau faute de budget régional ?
En fait, cela ne nous paraitrait pas contradictoire ni scandaleux que Pôle Emploi récupère un jour entièrement la formation professionnelle, ce qui permettrait finalement de mieux articuler l’habilitation des organismes de formation, les aides individuelles et la mobilisation du CPF. En matière d’économie et d’emploi, nous sommes toujours plutôt favorables à une approche nationale et une vision centralisée d’un état stratège.
D’ailleurs même les CREFOP ne sont pas devenus les lieux de concertation que prévoyait la loi, ils n’ont pas permis d’élaborer des indicateurs communs permettant de tenir des tableaux de bord partagés, ni de réaliser des comparaisons entre les régions, chacune d’entre elles a en fait élaboré son propre plan régional de développement des formations et d’orientation professionnelles (CPRDFOP).
A titre d’exemple l’organisation est bien plus simple en Allemagne : le financement de la formation des demandeurs d’emploi relève uniquement de l’Agence fédérale pour l’emploi qui est directement financée par les cotisations sociales. Et les formations qui favorisent le retour rapide à l’emploi sont organisées par les entreprises et les branches.
3ème réflexion :
C’est qu’au-delà de la gestion proprement dite, des efforts d’amélioration doivent porter sur l’appréciation des besoins, sur les conditions d’entrée en formation et la qualité des formations suivies.
Quand on découvre la liste de 4 pages avec les dizaines d’organismes de Formation que finance la Région, il y a urgence à faire du tri, à être beaucoup plus exigeant sur les contenus et qualité des formations, sur leur obligation de suivi des stagiaires après la formation. Il faut négocier les prix, la durée, donner une plus grande place aux formations courtes et opérationnelles débouchant sur un retour rapide à l’emploi, plutôt que des formations de longue durée, favoriser les aides individuelles, plutôt que collectives…etc..
La Région est même incapable d’avoir une connaissance exacte des dépenses et des recettes de la formation professionnelle, de l’apprentissage et des formations sanitaires et sociales qu’elle gère.
Sachant que nous, c’est pas, comme la gauche, ce n’est sur les Organismes de Formation qui perdent des appels d’offre que l’on pleure mais sur les demandeurs d’emplois qui sont les 1ers à faire les frais de ces systèmes complexes, de ces formations qui ne débouchent sur rien.
Pour conclure, je voudrais mettre l’accent sur un rôle essentiel qui incombe à la Région et qui reste pourtant totalement inexistant, c’est celui de l’Information et de l’Orientation.
Demain l’Onisep va être transféré aux Régions. C’est un enjeu majeur pour l’emploi des jeunes et qui permet justement de travailler en amont pour réduire le chômage des jeunes.
Voilà un vrai levier avec lequel la Région peut innover pour changer les choses. Parce que s’il y a en Auvergne Rhône-Alpes 120 000 postes qui ne sont pas pourvus c’est surtout parce qu’on n’en fait pas la promotion dans le système éducatif général et qu’à côté de cela il y a des formations pour des métiers qui n’embauchent pas.
Un bel enjeu pour se mettre au travail.
Nous voterons POUR ce rapport.
Amendement présenté par Muriel Burgaz
ON A OUBLIE QUE CE SONT LES ENTREPRISES QUI RECRUTENT !
La Région annonce une nouvelle organisation et un nouveau financement du SPRFP avec des objectifs prioritaires pour la création d’emplois et pour des formations orientées sur les filières dynamiques, afin d’aider celles qui ont du mal à recruter (numérique, tourisme, agriculture, énergie durable, etc.), pour réserver ces créations d’emplois en priorité aux entreprises de la région.
Alors même si les partenaires sociaux, les organisations professionnelles sont présents dans le CREFOP, le dispositif mis en place et les actions proposées nous paraissent lourds et compliqués à faire fonctionner : trop d’administratif, de concertation, d’organismes, de canaux de décisions, …
Pour les entreprises ce sont des dispositifs complexes et contraignants quand ils ne sont pas tout simplement méconnus.
Il nous paraitrait plus souple, plus simple et plus efficace de chercher à travailler directement avec les entreprises. De récentes études et interviews de chefs d’entreprises ont montré leur souhait de se rapprocher des Régions pour une mise en place plus simple et plus directe qui les aiderait à solutionner leur pénurie de main d’œuvre et recherches de compétences.
Travailler en direct avec les entreprises est une solution qui présente 4 avantages :
– Une simplification et une réactivité bien plus efficaces que de réunir des comités, des collectivités, des instances et divers comités pléniers, pour analyser et réfléchir !- On est sûr de s’orienter vers les métiers qui embauchent plutôt que de payer des organismes d’études et d’analyse pour savoir quels sont les besoins des entreprises !
– Des emplois qui restent dans la Région.
– Un moyen d’éviter la solution des travailleurs détachés.
AMENDEMENT :
I) FORMER POUR L’EMPLOI EN AUVERGNE-RHONE-ALPES
Compléter le point 1.2) comme suit :
o Proposer aux grandes entreprises régionales un partenariat direct avec la Région permettant d’identifier leurs besoins en recrutements pour les mettre en contact avec les publics identifiés.
Amendement présenté par Muriel Bugaz
NON A L’UTILISATION DU BUDGET FORMATION PROFESSIONNELLE
POUR L’INSERTION DES REFUGIES
De plus en plus de mesures sont en train de se mettre en place pour orienter les budgets de la formation professionnelle vers l’insertion des réfugiés :
– Le Ministère du Travail vient d’appeler les structures d’insertion et de formation des réfugiés en France à candidater pour bénéficier d’aides financières (enveloppe de 15 millions d’euros)
– Dans ce cadre, le CREFOP lance depuis le 1er octobre un appel à projet destiné à l’intégration professionnelle des bénéficiaires d’une protection internationale (BPI) pour les réfugiés et les apatrides.
– L’AFPA a commencé à mettre en place un système de formation aux réfugiés : PILOT + Programme HOPE… qui propose aux migrants, ayant obtenu le statut de réfugié, une offre intégrant hébergement, restauration et formation professionnelle. Des demandes régulières parviennent à la Région dans le cadre des AIF (Aides à la Formation Individuelles) que la Région finance.
– Le Préfet de Région est intervenu pour souligner une priorité de l’Etat sur l’insertion professionnelle des réfugiés (titulaires d’un titre de refugié) et des accès prioritaires à leur réserver au niveau des aides, hébergement et priorité à l’emploi.
C’est une ouverture sans limite et donc irresponsable, qui ne peut que pénaliser les budgets des collectivités consacrés à la Formation Professionnelle et qui entraine une concurrence inacceptable d’accès à l’emploi ! En signant ce Plan et ses orientations, la Région encourage cette politique alors que son président annonce pourtant combattre.
AMENDEMENT :
I) FORMER POUR L’EMPLOI EN AUVERGNE-RHONE-ALPES
Compléter le point 1.3) comme suit :
o Accompagner tous les publics vers les emplois qui offrent des perspectives de recrutement, avec une attention particulière aux publics fragilisés. Plafonner le montant des aides en formations, accompagnement, logement, destinées aux réfugiés afin les réserver en priorité aux demandeurs d’emplois français résidant dans la région.
Amendement présenté par Muriel Burgaz
REFONTE DES CONVENTIONS AVEC LES PARTENAIRES EN CO-FINANCEMENT POUR LES AIDES INDIVIDUELLES A LA FORMATION
La Région finance les demandes d’aides individuelles à la Formation (AIF). Les conventions mises en place avec les partenaires prescripteurs comme Pôle Emploi, Agefiph, restent incomplètes et au désavantage de la Région.
Par exemple, il n’est pas normal :
– que la Région s’engage à 100% sans avoir de co-financement des autres partenaires ;
– que Pôle Emploi, qui va percevoir 60 millions d’euros à dépenser d’ici la fin de l’année pour la formation professionnelle refuse la prise en charge des demandes individuelles que la Région ne peut ponctuellement financer, faute de budget ;
– que la Région doive s’engager à financer des demandes envoyées par ces prescripteurs sans qu’eux-mêmes n’aient indiqué au préalable leur part de financement ;
– que ces partenaires orientent vers la Région des demandes de financement pour des profils et des formations qui n’entrent pas dans les critères de financement de la Région.
AMENDEMENT :
I) FORMER POUR L’EMPLOI EN AUVERGNE-RHONE-ALPES
Ajouter un point complémentaire 1.8) comme suit :
Renégocier les Conventions d’engagement en co-financement avec les partenaires prescripteurs tels que Pôle Emploi et l’Agefiph, notamment pour les Aides Individuelles à la Formation (AIF).
– Leur demander de notifier le montant de leur engagement préalable avant l’envoi du dossier aux services de la Région.
– Ne pas accepter de demande de financement de leur part si la Région s’engage seule.
– Renégocier les accords avec Pôle Emploi permettant d’exiger une aide financière sur les demandes individuelles qui n’ont pas pu être financées par la Région.
Amendement présenté par Muriel Burgaz
UTILISER LES BUDGETS DE LA REGION POUR UNE COMMUNICATION UTILE A SES PUBLICS PLUTÔT QUE POUR FAIRE LA PROMOTION DE LA REGION ET DE SON PRESIDENT !
Il est certain que la pénurie de mains d’œuvre et la difficulté à recruter viennent essentiellement d’un problème d’attractivité des métiers manuels, de l’image négative, dont ils souffrent auprès des jeunes, des familles, des enseignants, et également de l’inadéquation entre l’offre de formation initiale et les besoins.
Parmi ses objectifs dans la politique de « formation professionnelle et apprentissage » qu’elle doit mener, la Région a trois missions essentielles : L’INFORMATION, L’ORIENTATION, et la PROMOTION des filières professionnelles, de l’alternance, de l’apprentissage. Or, ce rôle de la Région est inexistant !
On avait suggéré l’idée dans un précédent amendement d’actions de mettre en place une campagne régionale d’affichage visant à valoriser des exemples de réussites régionales issues de l’enseignement professionnel et de l’apprentissage, avec des exemples concrets de chefs d’entreprises régionaux dans les différents secteurs d’activité. L’objectif étant de montrer que la réussite personnelle et la promotion sociale sont affaires de talent, de courage, d’appartenance à l’entreprise et pas seulement l’accumulation illimitées de connaissances. Ce qui est très important pour les jeunes, c’est découvrir concrètement de telles réussites et ces possibilités de promotion sociale.
AMENDEMENT :
- FORMER POUR L’EMPLOI EN AUVERGNE-RHONE-ALPES
Ajouter un point 1.9)
La volonté de prendre à cœur son rôle d’information, d’orientation, de promotion et de valorisation des filières professionnelles et des métiers à travers des actions nouvelles et originales envers les jeunes, les enseignants et de manière générale envers le grand public à travers une mise en valeur d’exemples de réussites régionales dans les différents secteurs économiques.
Amendement présenté par Muriel Burgaz
REFONTE DE LA POLITIQUE DE COMMANDE PUBLIQUE :
Revoir les critères de choix des organismes de Formation
Si le choix a été mis sur le fait de ne financer que des formations qui permettent de trouver un emploi en Auvergne-Rhône-Alpes, il parait urgent et indispensable de revoir le choix des organismes de formation et d’être plus exigeant sur les débouchés, certains organismes ne faisant que vendre des formations.
Il est surprenant que les critères n’aient pas été changés depuis l’arrivée du nouvel exécutif régional depuis bientôt trois ans, alors que, quand on veut changer de politique, la 1ère chose est de modifier les critères.
AMENDEMENT :
I) FORMER POUR L’EMPLOI EN AUVERGNE-RHONE-ALPES
Ajouter un point complémentaire 1.7) comme suit :
o par la refonte des critères d’éligibilité, fondés sur l’insertion dans l’emploi en Rhône-Alpes, sur le suivi des stagiaires après la formation
o par la mise en place d’un plafond de financement
o par l’engagement et le contrôle de ne pas pouvoir cumuler des aides à la fois au niveau de l’organisme et à la fois en demandes individuelles.