Intervention de Bruno Desies – 14 juin 2018
Rapport n°AP-2018-06 / 17-4-1658
En Assemblée plénière auvergnate et rhônalpine du 14 juin 2018, Bruno Desies a expliqué précisément pourquoi les commerces de nos centres-villes meurent. En même temps, il a évoqué un certain nombre de solutions :
Monsieur le Président,
Sans vouloir décourager le Président HORTEFEUX, je peux le rassurer, les interventions qu’il a déjà énoncées n’enrayeront en rien le dépérissement des bourgs et centres-villes et encore moins les revitaliseront. Je vais m’expliquer.
Avec une régularité de métronome, les municipalités, la Région et maintenant l’État lancent des programmes de redynamisation de centres-villes ou plus exactement d’enrayement de leur dépérissement. Comme toujours venant du politique en France, UMPS du moins, pour qui il faut dépenser pour exister, l’approche bureaucratique est privilégiée pensant qu’il s’agit d’un problème d’infrastructures ou d’offres alors qu’il s’agit avant tout d’un problème de détournement de trafic et de concurrence faussée.
Détournement de trafic:tout simplement par la mise à disposition, via la baguette magique du PLU, d’emprises foncières vierges offrant des conditions idéales qui n’auraient jamais pu être réunies en centre-ville compte tenu du modèle économique promu par la grande distribution. Notons que ces emprises foncières sont généralement conquises sur d’excellentes terres agricoles, les meilleures sans que jamais nulle part l’écologie politique ne s’en soit inquiétée, prouvant par là même qu’elle n’a d’écologie que le nom. Concurrence faussée par la concentration disproportionnée des moyens financiers, le déséquilibre outrageant du rapport de force producteurs/distributeurs et l’accès privilégié au moins-disant mondial où le prix est le critère essentiel.
Comme déjà évoqué dans cette assemblée, le cas français est unique au monde et nécessiterait d’être expliqué.
Les conséquences de ces choix malheureusement toujours d’actualité sont dramatiques:abaissement de la qualité à force de tirer les prix vers le bas et dénaturation du rapport qualité/prix ; destruction des métiers et savoir-faire à l’origine de cette qualité mais aussi de cette recherche d’excellence et de goût du travail bien fait remontant par un long processus, faut-il le rappeler, aux corporations du Moyen-Âge ; signature écologique épouvantable, absence totale de consignation des emballages par exemple, ce qui n’est pas le cas d’autres pays autour de la France.
Gageons que l’essentiel des dépenses ainsi annoncées, proprement inqualifiées d’investissement, ne produira absolument rien. Je prendrai le cas de ma bonne ville de Voiron et de sa communauté d’agglomération parce que c’est le deuxième centre commercial en Isère, qui n’est pas le département le moins dynamique. Dans le cas de Voiron, c’est très mal parti avec la nomination avant toute chose d’un responsable chargé de restructurer les locaux commerciaux, se substituant ainsi à l’initiative privée qui mécaniquement s’en chargeait, s’il y avait un intérêt, autrement dit du trafic.
Dans le même registre, alors que l’on entend dire qu’il faut restructurer le centre-ville pour mettre à disposition de la grande distribution des surfaces adéquates, à Voiron, c’est l’inverse : une grande surface spécialisée et disposant de toutes les fonctionnalités pour fonctionner est sur les rangs pour se déplacer en périphérie dans les 51 000 mètres carrés complaisamment mis à disposition, depuis quelques mois, par la communauté d’agglomération.
Seule une approche proactive, que nous n’osons espérer, pourrait permettre dans certains cas, et au cas par cas, des résultats positifs : création de parkings en ouvrage de centre-ville au plus près des magasins avec une tarification attractive voire gratuite aux heures stratégiques, le samedi notamment;aménagement d’un ou deux espaces d’animation en ville; soutien financier résolu aux unions commerciales afin d’organiser systématiquement des animations de qualité au moins trois fois par an dont trois semaines au moins en décembre;création d’un site Internet présentant l’offre locale, nous en avons parlé en commission.
Monsieur le Président, posons le bon diagnostic et agissons en conséquence. Les questions que soulève ce rapport devraient dépasser une gestion de tiroir-caisse et être une composante intégrale de l’action économique de la Région. À son niveau, la Région peut peser sur les décisions et lancer un signal clair aux décideurs locaux sur la question notamment des zones commerciales de périphérie.
Nous réserverons notre vote à l’acceptation de notre amendement sur ce sujet.
Amendement présenté par Bruno Desies
Le dispositif national « Action Cœur de Ville » est une réponse à une prise de conscience tardive des ravages de la création de centres commerciaux en périphérie, auxquels s’ajoutent les conséquences désormais visibles de l’ouverture le dimanche de la grande distribution (que personne n’avait demandée).
Il serait inepte de financer des opérations de revitalisation de centres-villes dont les élus, simultanément, favorisent le dépérissement par l’inscription au PLU de créations ou agrandissements de surfaces commerciales en périphérie, surfaces commerciales, de plus, presque toujours conquises sur des terres cultivables.
Dans ce domaine, nous proposons de traiter les causes plutôt que les conséquences. Aussi dans l’attribution des crédits, nous proposons de servir en priorité les Municipalités (et/ou leur Communauté d’Agglomération) vertueuses qui ont une politique active de recentrage :
– en s’engageant à ne pas voter de nouvelles créations ou extensions de surfaces commerciales en périphérie et en annulant d’éventuelles décisions antérieures.
– en préemptant le foncier des établissements existants qui viendraient à cesser leur activité, phénomène en hausse qu’il faut saisir.
AMENDEMENT :
I DISPOSITIF CŒUR DE VILLE.
Compléter le I-1 avec le texte suivant :
I-1)
Le dispositif comprendra une convention avec les villes moyennes retenues visant à stopper le détournement du trafic commercial par une politique active de recentrage :
– en s’engageant à ne pas voter de nouvelles créations ou extensions de surfaces commerciales en périphérie et en annulant d’éventuelles décisions antérieures.
– en préemptant le foncier des établissements existants qui viendraient à cesser leur activité.