Intervention de Muriel Burgaz – 29 juin 2017
Rapport n° 540
En Assemblée plénière auvergnate et rhônalpine du 29 juin 2017, Muriel Burgaz a évalué la politique régionale en matière d’apprentissage :
Monsieur le Président, chers collègues,
En fait votre dossier n’annonce pas de changement fondamental.
On attendait plus de « nouveau et d’ambition », plus de volonté politique que de brassage administratif. On voit d’ailleurs que les élans ambitieux de votre campagne électorale ont été revus nettement à la baisse.
D’un objectif de 60 000 apprentis vous nous annoncez aujourd’hui 55 000. Que constate-on aujourd’hui ? Que malgré des investissements considérables, les résultats quantitatifs et qualitatifs de l’apprentissage restent médiocres. Pourquoi ?
1. Déjà, certes, c’est lié à la santé économique.
L’apprentissage reste un contrat de travail et il est évident que quand l’entreprise n’a pas suffisamment de travail, elle n’embauche pas d’apprentis.
On en profite pour rappeler que pour aider les entreprises à créer de l’emploi, ce n’est pas seulement leur distribuer des subventions, mais les aider à protéger leurs marchés,
C’est le sens de notre amendement : pouvoir clairement les récompenser par une priorité aux marchés publics de la région dés le premier apprenti employé.
La santé économique n’est cependant pas la seule raison.
2. Un autre frein est la complexité des démarches administratives
Un système tellement complexe que même les experts s’y perdent.
En plus de cela, le dirigeant doit faire face à une multitude de contraintes règlementaires qui ne les incite pas à embaucher un apprenti. A ce sujet, nous saluons la démarche de la Région d’engager un dialogue avec l’Etat pour expérimenter un assouplissement de cette règlementation. Mais nous pensons qu’il faut aller plus loin et définir une véritable charte qui permette une adaptation totale aux exigences de chaque corps de métier.
3ème logique que nous n’avons eu de cesse de souligner au front National, c’est qu’il faut remettre l’entreprise au centre du processus !
L’apprentissage est avant tout une affaire d’entreprise.
Si on veut que ce soit une arme efficace contre le chômage, il faut que l’apprentissage soit conçu et organisé en fonction de la demande réelle des entreprises et du monde du travail…
Aujourd’hui on voit bien que l’enseignement est totalement déconnecté des besoins des entreprises.
Et les entrepreneurs sont les premiers à le dire : les diplômes de l’éducation nationale – BEP- CAP – ne sont plus en rapport avec les besoins des entreprises : trop d’enseignement théorique, pas assez de connaissances pratiques.
En Allemagne, souvent citée en exemple et à juste titre pour sa réussite dans ce domaine, tout le système de l’apprentissage est construit autour de l’entreprise.
Ce sont les branches professionnelles qui édictent les titres professionnels et décident du contenu des formations.
Un autre constat montre que l’apprentissage a PLUS progressé pour l’enseignement supérieur et finalement, c’est là où il a le moins d’effets sur l’emploi. Car ce sont pour les jeunes sans diplôme préalable que l’apprentissage est le plus utile en termes d’insertion professionnelle et d’emploi et qu’il est donc plus logique de concentrer les efforts et les moyens publics.
4. Le 4ème et dernier point est plus psychologique. Le développement de l’apprentissage souffre d’un déficit d’image.
Depuis près de 50 ans, l’Éducation nationale considère la formation aux métiers comme un enseignement de seconde zone réservé aux enfants dits en échec scolaire. Et du coup les familles tombent dans le leurre du bac facile et des études supérieures pour tous.
Alors comment rendre l’apprentissage plus attractif et lui redonner ses lettres de noblesse ?
Déjà en proposant, voire même en rendant obligatoire, une formation à l’attention des professeurs et des services d’orientation, qui savent très bien orienter vers les études générales, mais beaucoup moins vers la voie professionnelle.
Ensuite promouvoir l’apprentissage auprès des jeunes en valorisant son rôle de promotion sociale. On est dans une société d’images, de rêves, d’exemples. On a besoin de moderniser notre communication à ce niveau là.
On manque de mise en valeur, d’histoires de réussite de vie, pourquoi pas au travers d’exemples concrets, dans la Région, de personnes qui ont « réussi » en débutant leur parcours par l’apprentissage.
Il faut montrer que la réussite personnelle et la promotion sociale sont affaires de talent, de courage, d’appartenance à l’entreprise, plus que d’accumulation illimitée de connaissances.
Nous ne devons pas négliger que nous sommes dans une société où le rôle des «services» va devenir de plus en plus important.
L’image de l’apprentissage n’en sera qu’améliorée si on démontre qu’il réagit rapidement aux changements de l’économie et que ce sont des filières d’avenir, d’excellence et de fierté régionale.
Nous voterons pour ce rapport.
Amendements présentés par Muriel Burgaz – 29 juin 2017
Rapport n° 540 : FAIRE DE NOTRE REGION LA PREMIERE REGION POUR L’APPRENTISSAGE
La Région Auvergne – Rhône-Alpes affiche l’ambition d’être la première Région pour l’apprentissage avec l’objectif d’atteindre en cinq ans 55 000 apprentis.
Pour atteindre cet objectif, les efforts doivent porter sur deux éléments essentiels :
– Réduire la complexité des démarches pour l’entreprise et lui offrir plus de clarté sur la législation et les aides.
– Améliorer l’adaptation des formations aux besoins réels de l’économie et des entreprises.
Or, les mesures annoncées concernent essentiellement le lien entre les organismes de formations et les apprentis mais n’agissent pas suffisamment sur le lien essentiel entre l’entreprise et la formation.
L’entreprise qui souhaite recruter un apprenti a besoin d’être aidée, informée, accompagnée dans la gestion de son dossier et dans sa recherche d’apprentis. Elle a du mal à savoir où s’adresser et à avoir une vision claire de la législation et des aides associées.
Un des exemples de cette complexité : une entreprise inscrite au répertoire des métiers doit s’adresser à la Chambre de Métiers et de l’Artisanat, une entreprise qui cotise à la Mutualité Sociale Agricole doit s’adresser à la chambre d’agriculture, une entreprise immatriculée au RCS doit s’adresser à la Chambre de Commerce et d’Industrie (CCI)…
Dans la mesure où la Région centralise les aides financières, il serait logique qu’elle propose un GUICHET UNIQUE D’INFORMATION dont les missions seraient de fournir aux entreprises en une seule démarche :
– toutes les informations concrètes et utiles sur l’apprentissage
– et la bonne orientation vers les acteurs concernés par les offres d’apprentissages spécifiques qu’elles recherchent.
Une centralisation qui permettrait également à la Région d’avoir une vraie photographie des besoins de l’économie régionale pour structurer plus efficacement tout le processus de la formation, de l’orientation jusqu’à la qualification et l’entrée en emploi.
AMENDEMENT :
Rajouter (I) :
de créer à la Région un Guichet unique de l’apprentissage.
Rapport n° 540 : FAIRE DE NOTRE REGION LA PREMIERE REGION POUR L’APPRENTISSAGE
Une bonne manière de développer l’apprentissage est d’encourager et de récompenser les entreprises qui font cet effort de formation et cet effort financier.
Orienter les appels d’offre des commandes publiques aux entreprises qui ont une politique active avec les apprentis serait une mesure juste et efficace, en plus basée sur le « gagnant-gagnant », le développement de l’apprentissage étant bien sûr lié à l’activité économique.
AMENDEMENT :
Ajouter (I) :
d’intégrer le recrutement d’apprentis aux critères de modalités d’appels d’offre pour l’attribution des marchés publics régionaux.
Rapport n° 540 : FAIRE DE NOTRE REGION LA PREMIERE REGION POUR L’APPRENTISSAGE
La Région souhaite engager un dialogue avec l’Etat afin d’expérimenter un assouplissement de la règlementation applicable aux apprentis mineurs en matière de durée et de conditions de travail.
AMENDEMENT :
Ajouter (1-7) :
D’établir un cahier des charges par métier qui permettrait d’adapter la règlementation et d’accorder des dérogations possibles selon les exigences propres à chaque corps de métier : apprentissage possible dès l’âge de 14 ans, adaptation des horaires (notamment pour les métiers de bouche et le bâtiment).
Rapport n° 540 : FAIRE DE NOTRE REGION LA PREMIERE REGION POUR L’APPRENTISSAGE
Pour formaliser la cohérence des politiques régionales d’apprentissage et de soutien aux entreprises, il est sain et logique que toute entreprise qui emploie un apprenti puisse être identifiée comme prioritaire dans l’attribution des différentes aides de la région.
On voit que l’Allemagne est un modèle en matière l’apprentissage, qu’elle a su en faire le ressort de la compétitivité de ses entreprises et la clef de l’insertion des jeunes dans l’emploi, notamment parce que c’est l’entreprise qui est reconnue comme acteur principal de l’apprentissage.
Il est nécessaire en France de lui permettre d’être mieux identifiée et reconnue comme telle.
AMENDEMENT :
Ajouter (I) :
de créer un label régional « entreprise formatrice » dès l’emploi d’un apprenti. Renforcer le rôle, les moyens et la formation du Maître d’apprentissage.
Rapport n° 540 : FAIRE DE NOTRE REGION LA PREMIERE REGION POUR L’APPRENTISSAGE
L’apprentissage est victime d’un déficit d’image et est trop souvent considéré par les enseignants, les jeunes et les familles comme une voie de garage.
Cette image de l’apprentissage reste négative en raison de l’ignorance de ses réalités par les enseignants, les services d’orientation et par les parents, ce qui du coup a transformé l’orientation vers l’apprentissage en voie « d’orientation par défaut ».
La relance de l’apprentissage passe donc par la lutte contre les idées reçues et par une revalorisation de son image dès l’entrée dans le second cycle.
Deux cibles principales essentielles :
– les enseignants et les conseillers d’orientation (premiers prescripteurs),
– les parents.
La Région peut être l’initiatrice d’une nouvelle forme de communication générique modernisée de valorisation de l’apprentissage à destination de ces publics, en partenariat avec les branches professionnelles. L’objectif est de montrer que la réussite personnelle et la promotion sociale sont affaires de talent, de courage, d’appartenance à l’entreprise et pas seulement l’accumulation illimitées de connaissances.
La promotion de l’apprentissage auprès de l’imaginaire des jeunes passera essentiellement par une valorisation du rôle de promotion sociale que cette voie peut apporter.
AMENDEMENT :
Ajouter (III-2) :
– par la promotion de l’apprentissage à travers une grande campagne régionale mettant en valeur les réussites personnelles et les parcours de vie de jeunes apprentis aujourd’hui chefs d’entreprise.
Rapport n° 540 : FAIRE DE NOTRE REGION LA PREMIERE REGION POUR L’APPRENTISSAGE
Ce qui est surprenant et contradictoire c’est que d’un côté les entreprises se plaignent de ne pas trouver d’apprentis, et de l’autre les apprentis se plaignent de ne pas trouver d’entreprises. C’est donc dans la modification profonde des missions des acteurs de la formation que se trouve l’une des solutions.
Aujourd’hui le rôle des acteurs de la formation (chambres consulaires, missions locales, MIFE, CDIFF, Pôle Emploi, …) est trop tourné vers l’administratif et pas suffisamment utilisé pour améliorer ce lien entre la demande et l’offre.
Les analyses indiquent que la partie identification des besoins des entreprises est une condition essentielle à la réussite des objectifs de développement de l’apprentissage et c’est pourtant une partie qui n’a pas suffisant été abordée dans ce dossier qui finalement n’ose pas opérer un vrai changement de fond et de fonctionnement en imposant aux acteurs de la formation des engagements et résultats concrets et chiffrés.
AMENDEMENT :
Ajouter (III) :
– de demander aux acteurs de la formation d’être plus actifs dans la connaissance du tissu économique local, d’être en lien avec l’économie réelle des entreprises, de mieux connaitre les bassins d’emploi, les branches professionnelles et entreprises locales qui recrutent,
– d’être plus actifs et impliqués dans la recherche d’entreprises susceptibles d’accueillir des apprentis,
– d’assurer un meilleur suivi des apprentis pendant et après la formation pour les accompagner le plus possible vers offres d’emploi proposées par les entreprises locales.
– En conséquence de lier les subventions de la Région à des obligations de résultats : nombre d’entreprises trouvées, nombres d’apprentis accompagnés vers l’emploi.