Intervention d’Erik Faurot – 9 février 2017
Rapport n° 4
En Assemblée plénière auvergnate et rhônalpine du 9 février 2017, Erik Faurot a défendu les pêcheurs et associations de pêche :
Monsieur le Président, chers collègues,
L’examen du plan de valorisation de la pêche qui nous est aujourd’hui soumis n’appelle que peu de remarques, je vous indique d’ailleurs d’emblée que nous nous apprêtons à le voter.
La pêche de loisir est une activité solidement ancrée dans les habitudes de la population française, on observe en effet que 40% de nos compatriotes déclarent avoir pratiqué la pêche en eau douce au moins une fois dans leur vie et, pour tordre le cou au passage à une idée reçue, les plus de 65 ans sont sous-représentés dans les études de profil des pêcheurs. On y trouve même un nombre croissant de jeunes et de très jeunes, ces derniers sensibilisés et initiés par le biais des très dynamiques écoles de pêche.
Sur le plan du fonctionnement financier, les structures associatives de pêche de loisir sont financées à 80% par les cotisations de leurs adhérents, les subventions publiques et les partenariats locaux représentent les 20% restants. L’impact économique de cette activité atteint pour l’ensemble du territoire les deux milliards d’euros.
La notion de contact avec la nature a depuis bien longtemps supplanté celle de la nécessité de s’alimenter et aujourd’hui nombreux sont les pêcheurs à pratiquer ce que j’appellerai ici, comme on le fait au Canada, le « pêcher-relâcher »qui consiste à redonner sa liberté au poisson aussitôt capturé. J’emploie cette locution à dessein car nous le savons, nos amis canadiens parlent un français qui bien souvent a le mérite d’être plus académique que le nôtre.
On peut donc s’étonner que sur les berges de nos cours d’eau français lorsque cette pratique de « pêcher relâcher » est encouragée, on voit ainsi fleurir des panonceaux indiquant « NO KILL » anglicisme d’autant plus absurde et infondé que les anglo-saxons eux-mêmes emploient l’expression : « catch and release » traduction parfaite de « pêcher-relâcher », la boucle est bouclée.
Sans doute chez nous a-t-on redouté de paraître ringard en s’exprimant en français et cette pratique magnanime consistant à laisser la proie retourner à son milieu naturel plutôt que de rejoindre un obscur congélateur ne pouvait certainement s’entendre que comme une généreuse habitude provenant des lointaines et légendaires contrées américaines.
Il est permis de regretter au passage que la population de bisons d’Amérique du Nord n’ait que fort peu bénéficié du « catch and release ».
Nous avons pu constater dans cette enceinte et à de nombreuses reprises que la notion de transversalité pouvait présenter un réel intérêt. En l’espèce, peut-être que la stricte application de la clause Molière à la signalisation des sites de pêche constituerait un salutaire rempart contre la négligence de notre langage.
Le pêcheur d’aujourd’hui est donc plus un amoureux de la Nature qu’un prédateur, il présente souvent une bonne connaissance des espèces aquatiques et de leur milieu et il endosse bien volontiers le rôle d’acteur de la protection de l’environnement. Cela tient sans doute au fait que les pêcheurs exploitent une ressource produite par l’environnement naturel et totalement tributaire de la qualité des écosystèmes dont elle fait partie. De fait, sa disponibilité est liée à l’état de l’environnement et elle peut être accrue par sa conservation. Dans un contexte de bonne gestion, la pêche de loisir restera une activité durable reposant sur une ressource renouvelable.
Les pêcheurs sont également reconnus comme des acteurs importants du développement du territoire, essentiellement par le biais des associations locales de pêche dont chacune d’entre-elles entretient en moyenne 70 km de rives, en assure la gestion de la biodiversité autant que la gestion halieutique, le nettoyage des berges ainsi que leur accessibilité.
Pour les fédérations départementales, c’est en moyenne par fédération 2700 km de rives à charge et 710 hectares d’étangs et de plans d’eau. Sont compris dans cet entretien le retrait des obstacles transversaux, la mise en œuvre d’ouvrages de franchissement, des dérivations de plans d’eau et bien d’autres actions encore.
Les fédérations de pêche assurent mobiliser près de 60 millions d’euros pour ces actions dites : « linéaires » et les structures associatives de 10 à 20 millions. Il faut en déduire que sans ce financement et l’investissement des bénévoles, la protection et la restauration du milieu nécessiteraient un investissement supérieur et porté par d’autres financeurs, les agences de l’eau entre autres.
Nous sommes devant un mode de fonctionnement extrêmement vertueux qui mériterait certainement un effort plus conséquent de la part de la région. La remarque rejoint d’ailleurs celle que nous faisions il y a quelques mois concernant la chasse.
Reconnaissons que 3 millions d’euros ça n’est somme toute pas si cher pour s’attirer la sympathie de dizaines de milliers de pêcheurs et bénéficier d’une publicité quasi permanente dans les pages de leurs revues de liaison.
Nous estimons donc ce projet de partenariat un peu « petit bras » financièrement mais nous sommes par ailleurs soulagés de ne pas y voir l’ombre tentaculaire des habituelles nébuleuses associatives.
En conséquence, notre groupe émettra l’avis favorable que j’évoquais au début de mon propos.