Intervention de Charles Perrot – 29 juin 2015 – 29 juin 2015
Rapports n° 15.12.408 et 15.12.409
Monsieur le Président, Monsieur le Vice-président,
Mois de juin, mois traditionnel de la publication des bilans des entreprises, également mois de la publication des comptes administratifs des Régions, exercice habituel. Mais M. DEBAT nous l’a rappelé ce matin, un compte administratif isolé, comme pour d’ailleurs les entreprises un bilan isolé, n’a que peu de valeur. Il a une valeur d’enseignement ponctuel, mais je pense qu’effectivement, et vous avez fait cet exercice ce matin, Monsieur DEBAT, il est intéressant de voir les chiffres d’un compte administratif et de les mettre en perspective avec les exercices précédents. Vous vous êtes limité aux cinq exercices tels qu’ils nous sont fournis en annexe 1. Je crois que c’est plus intéressant d’aller un peu plus loin, parce que cela montre quand même, sur une période plus longue, les tendances qui sont suivies, matérialisées par les chiffres, et cela rend intelligible, sur une période pluriannuelle, une traduction chiffrée des choix politiques faits par votre exécutif, Monsieur le Président, depuis que vous êtes arrivé à la responsabilité de cette Région. C’est pour cela que je vais remonter au compte administratif 2004.
Compte administratif 2004 – compte administratif 2014 : 11 exercices. C’est intéressant de voir comment les chiffres ont varié dans cette période de vos deux mandats, Monsieur le Président, et de voir comment ils ont varié non seulement à mêmes chiffres sur ces 11 exercices, mais les rapports de ces chiffres entre eux au cours d’un même exercice. Je vais essayer de faire un petit exercice d’explication, parce qu’on reproche souvent aux élus : « On ne sait pas trop ce que vous faites. Expliquez-nous, dites-nous comment ça se passe ? ». Il est important de faire un peu œuvre de pédagogie, et pour les Rhônalpins, de comprendre comment ça se passe, ce qui s’est passé depuis 4 ans, 5 ans, 10 ans, 11 ans, depuis finalement que la majorité a changé dans cet hémicycle. Je crois que c’est dans notre rôle, et je pense être un peu dans mon rôle, aussi pour la presse qui est présente, de donner des éléments d’enseignement. Je ne voudrais pas alourdir trop notre matinée, je vais m’attacher à six chiffres comparés. Pour certains d’ailleurs, je vous retrouve dans ce que vous avez dit ce matin, Monsieur DEBAT. Pour d’autres, je ne suis pas tout à fait d’accord.
Je vais prendre le compte administratif 2004 et le compte administratif 2014, avec six chiffres : les dépenses de fonctionnement. Les dépenses d’investissement. Le budget global. Le taux d’épargne, brute ou nette. L’encours de la dette au 31 décembre. Et son corollaire : le ratio de désendettement consolidé. Ce sont les six chiffres qui sont dans vos tableaux, je ne suis pas allé bidouiller des chiffres.
Le budget global : il était en 2004 de 1,499 milliard d’euros, et en 2014 de 2,343 milliards. Plus 840 millions d’euros en 11 ans, plus 56 %. Je pose déjà une première question : 56 %, c’est ce chiffre référence, comme si finalement votre budget traduisait une évolution normale de l’évolution normale du coût de la vie, des salaires, de la hausse du pouvoir d’achat ou pas, des ménages. Vous avez dit que depuis 4/5 ans, la hausse est de plus 1 % en moyenne. Moi, plus 56 % en 11 ans, je rapproche cela de l’évolution du Smic. Quelle a été l’évolution du Smic sur ces 11 ans ? Plus 14 %. C’est-à-dire que la performance en termes de budget, la mas se totale dont vous avez disposé, à un taux de plus 56 %, est 4 fois plus que la hausse moyenne des salaires. Alors, je sais bien qu’il y a eu des compétences transférées, et il faut les assumer, mais j’y reviendrai.
Les dépenses de fonctionnement : en 2004, 885 millions d’euros. En 2014, 1 683 millions d’euros. Plus 190%. Grosso modo, pour faire simple, on a multiplié par 2. Les dépenses de fonctionnement en volume ont été multipliées par 2 en 11 ans. Et tout cela bien évidemment, vous nous le dites année après année : c’est normal, c’est nécessaire, compétences transférées, compétences transférées, l’État nous file des compétences essentiellement dans le fonctionnement, évidemment les personnels des lycées, etc. Très bien, je peux l’entendre, mais j’y reviendrai tout à l’heure quand même.
Parce que dans le même temps, les dépenses d’investissement, elles, et avec votre rigueur de métronome, année après année, au compte administratif, vous nous dites que vous avez finalement un investissement qui est non seulement bon, une politique d’investissement soutenue, toujours la même chose. Mais les dépenses d’investissement étaient de 894 millions en 2004, elles sont de 864 millions en 2014. Si, Monsieur DEBAT, prenez vos chiffres, nous sommes passés de 894 millions en 2004 à 864 millions en 2014. C’est-à-dire que quand dans le même temps, vous avez doublé le fonctionnement, vous avez diminué de 4 % l’investissement. Alors, admettons que vous ayez maintenu l’investissement, c’est ce que vous dites : un investissement maintenu. Oui, mais il faut rapporter l’investissement à la possibilité, au budget que vous avez. Et c’est là où c’est terrible : quand le budget augmente de 56%, l’investissement a baissé de 4 %. Et d’ailleurs ces chiffres sont corrélés par les suivants : le fameux taux d’épargne, dont là aussi vous vous gargarisez en disant : « Nous avons un niveau d’épargne brute qui reste très bon. » Quel était le taux d’épargne brute en 2004 ? 29 %. Quel est-il en 2014 ? 18 %. Le taux d’épargne nette était de 25 % en 2004. Il est à 13 % en 2014. Le taux d’épargne nette a été divisé par 2.
L’encours de la dette au 31 décembre 2004 : 1 499 millions d’euros, 1,5 milliard pour faire simple. Encours de la dette au 31 décembre 2014 : 2,343 milliards d’euros. L’encours de la dette a été multiplié par 3.
Et le ratio de désendettement consolidé, qui suit logiquement, son corollaire, lui aussi a été multiplié par 3. Exprimé en années, il est passé de 2 années à 6 années.
Voilà ainsi exprimés aussi simplement, ce sont vos chiffres à vous, Monsieur le Président, les fondamentaux du socialisme appliqués à cette collectivité locale. Une situation en 2004 dans laquelle le poids de l’investissement était à peu près égal au poids du fonctionnement. Et une situation 11 ans plus tard dans laquelle le fonctionnement ponctionne deux fois plus que l’investissement. Et les transferts de compétences ont bon dos. La hausse en fait du budget de plus 840 millions d’euros a été entièrement consacrée à la hausse du fonctionnement de plus 800 millions d’euros. J’aimerais donc résumer en chiffres simples, en mots simples, ce qui s’est passé en 11 ans : toujours plus de fonctionnement, pour moins d’investissement. Toujours plus d’endettement, pour moins d’épargne. Toujours subventionner largement des structures et des associations. Mais tout cela étant dit de façon subreptice, on enfume un peu les conseillers régionaux, on enfume beaucoup les citoyens, et en ce sujet, la matière est abondante.
La matière, pour vérifier que ce que je dis n’est pas totalement faux, voire même est vraiment très vrai, il faut se plonger dans un très volumineux document, qui est l’annexe 4, que vous avez fournie, c’est 1 134 pages, pour découvrir dans ce volumineux dossier comment a été dépensé tout au long de l’année l’argent de la collectivité. Cela fait environ 20 000 lignes de subventions. Quand on se plonge dans cette annexe 4, c’est une véritable caverne d’Ali Baba, les Quarante voleurs ne doivent pas être très loin. Une mine de données, classées apparemment savamment avec des sous-sections, des chapitres : associations, personnes morales, personnes physiques, communes, autres organismes publics, classées par département. C’est très difficile de se dire : finalement, j’aimerais savoir combien a touché telle association et où je retrouve tout cela ? Il faut faire un travail important de consolidation. Je l’avais déjà fait quelques années pour quelques associations, dont je vais vous reparler aujourd’hui. C’est long, mais c’est quand même riche d’enseignement. On trouve de tout dans ce patchwork. Ce qui est intéressant, c’est l’art du saucissonnage. Quand on veut planquer quelque chose, il vaut mieux, plutôt que de mettre un gros chiffre, mettre beaucoup de petits chiffres partout. Mais quand on fait l’exercice d’aller chercher beaucoup de petits chiffres partout, on refait le gros chiffre. Deux exemples : dans le domaine de la protection de l’environnement, avec l’association FRAPNA. On a beaucoup parlé de la FRAPNA depuis des années. Nous avons été constants dans la dénonciation de cet organisme. Je sais bien que vous l’adorez cette FRA PNA. Je sais bien que derrière ils se mettent à voter comme nous depuis quelques années, mais toutes les années avant ils votaient systématiquement… Je parlerai aussi de M. WAUQUIEZ tout à l’heure en conclusion.
La FRAPNA : j’additionne FRAPNA région et les 8 FRAPNA départementales : 103 lignes de subventions en 2014. Si on compte les semaines où l’on travaille vraiment, j’élimine les vacances, ce sont 2 à 3 lignes de subventions par semaine. Une véritable entreprise, une espèce de chiffre d’affaires qui tombe régulièrement, toutes les semaines ça tombe. Quand vous additionnez ces 103 lignes de subventions, on arrive à un total de 960 372,20 euros. Plus de 960 000 euros sur le seul exercice 2014. J’avais déjà fait le travail en 2010 : 807 000 euros, et en 2009 : 776 000 euros. Finalement, la FRAPNA est à l’image des frais de fonctionnement de cette Région, toutes les années, je ne suis pas à 1 % mais à plus 3 ou 4 %. 1 million par an pratiquement pour la FRAPNA en 2014.
Une chose intéressante aussi : les syndicats. Je m’adresse directement à vous, Messieurs, Mesdames, les syndicats : le plus intéressant, c’est la CGT : l’année dernière, 347 000 euros. C’est très, très bien, c’est d’ailleurs beaucoup mieux qu’en 2010 où vous n’aviez eu que 172 000 euros. Là, vous avez fait du 100 % d’augmentation. C’est bien, on double. En 4 ans, vous avez doublé. Moins il y a de syndiqués, plus ça coûte cher.
Ces niveaux de soutien régional, Monsieur le Président, sont pour nous indécents. Ils seraient acceptables si effectivement nous n’étions pas en situation de crise depuis des années. Ils sont à ce niveau-là indécents. Je considère que c’est une injure à la raison, une injure à la nécessaire solidarité que nous devons à nos compatriotes les plus démunis. Je trouve que c’est scandaleux.
Je voudrais conclure, parce qu’on a parlé de M. WAUQUIEZ, très intéressant quand même, parce que ces chiffres de 2014, ces subventions ont été votées, et nous avons fait le détail, commission permanente après commission permanente, tout au long de l’année 2014, il y a eu 6 commissions permanentes : 92 % de ces subventions au compte administratif ont été votées par les amis de M. WAUQUIEZ. Alors, quand M. WAUQUIEZ aujourd’hui vous dit que 60 % partent en fumée, il faudrait d’abord que M. WAUQUIEZ se renseigne sur ce que ses amis ici, dans ces bancs, ont fait l’année dernière : ils ont voté 92 % de votre budget et de vos dépenses. L’UMP-PS n’a jamais si bien porté son nom. Nous, nous n’avons voté que 52%. Voilà la différence.
Merci, Monsieur le Président, et bon appétit !
Charles Perrot (FN) critique la gestion de la… par FNRhoneAlpes