Intervention de Dominique Martin – 18 décembre 2013
Rapport n° 13.02.750
Monsieur le Président, chers collègues,
Le Front National a toujours soutenu au sein de cette Assemblée la Validation des Acquis de l’Expérience introduite par la loi de modernisation sociale n°2002-73 du 17 janvier 2002, car nous estimions nécessaire, voire indispensable, d’encourager les salariés véritablement volontaires qui font l’effort de suivre des formations au sein de l’entreprise comme à l’extérieur, sur leur temps de travail ou sur leur temps libre, pour progresser professionnellement.
Nous avons suivi et accompagné les nombreuses étapes de la VAE :
– sa mise en place en 2002 et 2003,
– la création des Points Relais d’Information Conseil, les PRIC en 2004.
– le Pass VAE en 2005,
– le choix des quatre orientations structurantes en faveur de la VAE en 2011,
– la mise en œuvre à titre expérimental dès 2014 d’un e-portfolio, en 2012.
Mais dix années ont passé, et il est temps de faire un premier bilan.
Je vais être direct, ce n’est pas brillant…
On le trouve dans l’exposé de vos motifs : entre 2003 et 2012, seulement 30 000 Rhônalpins se sont présentés devant un jury VAE, et 89 % ont validé totalement ou partiellement une certification.
Outre qu’il faudrait nous expliquer ce qu’est une certification partielle (selon moi, on obtient ou pas un certificat, pas une partie de certificat), ces 30 000 personnes en dix ans ne font au final que 2 670 certifiés par an, soit une moyenne de 333 par an et par département, en comptant les « partiellement ».
Il serait intéressant de savoir combien il y a de « totalement certifiés », et combien cela a coûté à notre Collectivité sur 10 ans. Je pense que M. Meirieu pourra nous répondre.
Mais il y a plus inquiétant pour nous.
La loi n°2009-1437 du 24 novembre 2009 relative à l’orientation et à la formation professionnelle tout au long de la vie (précédée par l’Accord National Interprofessionnel) dispose que la VAE, je cite, « vise à permettre à chaque personne, indépendamment de son statut, d’acquérir et d’actualiser des connaissances et des compétences favorisant son évolution professionnelle ainsi que de progresser d’au moins un niveau de qualification au cours de sa vie professionnelle ».
La VAE concerne donc, d’après la loi, l’ensemble des citoyens, salariés, demandeurs d’emplois, non-salariés ou bénévoles.
Or, que constate-t-on dans l’exposé de vos motifs, en milieu de page 295, je cite : …la Région « finance l’animation et les conseils VAE auprès de publics prioritaires (demandeurs d’emploi et salariés fragilisés), excluant de facto du dispositif les salariés non fragilisés, les non-salariés et les bénévoles.
M. Meirieu pourra également nous définir ce qu’est « un salarié fragilisé » ? Auriez-vous des critères discriminatoires ?
Dix années ont passé, et il est donc temps de signer un nouveau protocole d’accord entre l’État, la Région et les organisations représentatives patronales et salariés, objet de cette délibération.
Monsieur le Président, chers Collègues,
On trouve de bonnes choses dans ce nouveau protocole :
– comme l’axe 4 « Développement de la fonction jury » qui préconise la participation de professionnels aux jurys de validation et une formation pour ces derniers,
– comme le point 1 de l’axe 5 qui vise à favoriser les projets collectifs de VAE dans les branches et/ou les territoires,
– comme l’axe 6 « Organiser la visibilité des parcours VAE » qui décide la mise en place d’un dispositif de suivi des personnes en parcours VAE.
Mais il y a quelque chose qui nous gêne fortement dans ce nouveau protocole, une notion plusieurs fois répétée dans le chapitre II qui définie vos « nouvelles orientations prioritaires», cette notion de « …personnes qui en ont le plus besoin… » ou de « …publics en ayant le plus besoin… ».
On retrouve cette notion dans l’axe 2 qui décide « d’une fonction d’assistance renforcée », quand il est écrit que « …les signataires (…) décident d’aider plus particulièrement des publics prioritaires… ».
Le point 2 de l’axe 2 qui définie « La mission d’assistance renforcée » parle même « d’appui matériel et psychologique », et l’axe 6 (portant intéressant comme je l’ai dit) sera finalement réservé « à titre expérimental », dites-vous, aux « personnes bénéficiant de l’assistance renforcée ».
M. Meirieu pourra peut-être nous éclairer en nous expliquant clairement qui sont ces « personnes qui en ont le plus besoin » ou ces « publics en ayant le plus besoin » et ces « publics prioritaires » qui nécessiteraient une assistance renforcée et un « appui matériel et psychologique » ?
Sa réponse sera d’autant plus pertinente que l’axe 3 « Améliorer la prise en charge de l’accompagnement VAE » précise qu’ « une prise en charge des publics spécifiques (bénévoles, conjoint d’artisans, etc.) » sera (‘sera ‘, au futur) à organiser. C’est bien, nous apprécions, mais c’est pour quand, dans quels délais, avec quels moyens ?
Quels sont donc, M. Meirieu, ces critères qui différencient ceux, « fragilisés », « qui en ont besoin », qui ont tout et tout de suite, de ceux « bénévoles, conjoint d’artisans, etc. » qui attendront, contrairement à ce que préconise la loi évoquée plus haut du 24 novembre 2009 relative à l’orientation et à la formation professionnelle tout au long de la vie ?
Nous craignons, une fois encore et comme tout le monde le sait (bénéficiaires, organismes, entreprises, etc.) que ce ne soit qu’un protocole de plus pour assurer le traitement social du chômage : les demandeurs d’emploi, dans leur grande majorité, entrent en formation, VAE ou autres, uniquement pour le maintien de leur situation financière, sans vraiment profiter des formations proposées. Ils en sortent en cours de cycle sitôt un emploi retrouvé, alors que la formation est intégralement payée par la Région aux organismes : beau gaspillage de l’impôt des Rhônalpins, joli rendement pour les organismes bénéficiaires.
Les pseudos stagiaires de la formation sont tenus sous perfusion dans l’attente d’un nouvel emploi plus ou moins précaire, sans véritables motivations quant au contenu des formations dispensées.
Et je peux d’ores et déjà vous le prédire, les nouvelles mesures gouvernementales annoncées la semaine dernière, en accord avec les syndicats patronaux et salariés, n’y changeront rien : ce n’est que du replâtrage. Cet accord ne fait malheureusement que maintenir un système opaque, clientéliste et totalement injuste pour les PME qui le financent et pour les salariés qui ne bénéficient pas pleinement de ces fonds.
Monsieur le Président, chers Collègues,
En attendant impatiemment les réponses et les explications de M. Meirieu, que je sais honnête et sincère, le Front National ne cessera pas de prôner l’effort et le mérite, et continuera d’aider toutes celles et tous ceux qui veulent s’élever, dans leur propre intérêt, comme dans l’intérêt de la collectivité toute entière, plutôt que de profiter de tous les avantages sociaux qui entretiennent l’oisiveté et la décadence de notre société.
Je vous remercie de votre (aimable) attention.