Intervention de Bruno Gollnisch – 20 décembre 2013
Rapport n° 13.12.744 : Présentation de l’équilibre général et vote du budget primitif 2014
Monsieur le Président,
Comme Saint Bonaventure écoutant Saint-Thomas dans une dissertation théologique, en écoutant Mme GROSSETETE, j’avais envie de déchirer dans les manches de ma bure le discours que j’avais préparé, tant Mme GROSSETETE est éloquente. Éloquente, mais surtout dans l’opposition. C’est le cas d’ailleurs de nos collègues UDC d’une façon générale. C’est le cas de M. CHRIQUI. Quel dommage, toutefois, que la politique qu’ils recommandent n’ait pas été suivie quand ils étaient majoritaires dans cette assemblée. Quel dommage que M. MILLON, intégrant tous les amendements écologistes, socialistes et communistes, pour éviter simplement la maîtrise de l’augmentation de la fiscalité que nous lui recommandions, ait cru devoir augmenter par conséquent la fiscalité locale de 60 % en une seule année. Quel dommage que ces préceptes vertueux n’aient pas trouvé leur chemin au cours de la mandature écoulée de M. SARKOZY, mais ce n’est pas pour autant que nos collègues se trompent.
Il est vrai, Monsieur le Président, que dans une situation difficile vous manifestez quelques tendances vertueuses. Oh ! bien modestement, mais enfin ! Vous nous aviez proposé un budget primitif en diminution de 20 millions d’euros. Il n’est pas absolument faux de dire, comme le dit M. DEBAT, que depuis pratiquement cinq années, les dépenses de la Région présentent une relative stabilité. Le problème est quand même multiple. Il a été évoqué précédemment par mon collègue Charles PERROT. C’est l’augmentation à l’intérieur de cette somme de la part dédiée au fonctionnement (+ 2,7 %) et la diminution importante de la part consacrée à l’investissement (- 8,4 %). Là encore, M. DEBAT a pu répliquer en faisant une distinction légitime dans son principe entre les dépenses de fonctionnement d’intervention et celles qui relèvent effectivement du coût du fonctionnement de notre collectivité locale. Il n’en reste pas moins que la dépense de l’investissement est importante et préoccupante.
Mme GROSSETETE a dit que votre budget était sans ambition. Notez qu’il est assez difficile de demander, d’une part, une augmentation des ambitions de la collectivité locale et, d’autre part, une diminution de ses dépenses. L’ambition est généralement coûteuse. Je crois que cette observation de notre collègue, président du groupe UDC, n’est pas exacte. Votre budget continue de présenter des ambitions. Ce sont les ambitions idéologiques dont vous avez beaucoup de mal à vous défaire : la démocratie participative, le dogme de l’interchangeabilité absolue des personnes, des sexes, des nations, des origines, la bouteille à l’encre que constitue la prétendue lutte contre les discriminations, etc.. Tout cela subsiste. Encore qu’en homme raisonnable,vous ayez quand même décidé de tailler dans ces budgets, dont je pense qu’au fond de vous-même, vous percevez la fondamentale inutilité.
Nous aurions évidemment souhaité davantage d’économies. Les amendements de nos collègues UDC proposaient une baisse de dépenses de 22 millions d’euros. Ce qui est très raisonnable. Les nôtres avoisinaient les 49 millions d’euros. Ce qui l’est plus encore, serais-je tenté de dire. Évidemment, il vous faut contenter une majorité qui est de plus en plus disparate et qui vole un peu en éclats. Comme d’ailleurs l’entourage politique de M. Gérard COLLOMB, ainsi que le montrent les graves incidents survenus récemment et qui mettent en cause des élus d’arrondissement. Vous n’êtes pas d’accord sur bien des choses avec le Front de Gauche, ni avec nos collègues écologistes,qui sont venus à une analyse beaucoup plus sage de l’énorme et pharaonique – ce sont les termes qu’ils ont utilisés très justement – projet Lyon-Turin.
Monsieur le Président, au risque d’être accusé par vous de psittacisme, je vous ferais observer qu’il n’est pas de bonne gestion pour donner satisfaction à ces groupes de votre majorité d’intégrer leurs amendements en les dispensant de l’excellente discipline qui voudrait qu’ils proposent une augmentation des recettes, c’est-à-dire de la fiscalité. À ce moment-là, les citoyens seraient en mesure de juger qui dépense quoi, pour quel usage ou bien une économie sur d’autres chapitres. Non, vous vous êtes contenté là-dessus de gages parfaitement formels et complètement irréalistes. Je pense notamment à celui, assez drôle d’une certaine façon, qui aurait abouti, s’il avait été pris au mot, à diminuer les moyens généraux de moitié. Je me prends d’ailleurs à regretter que vous n’ayez pas pris nos collègues au pied de la lettre. C’eût été extrêmement intéressant pour la gestion de cette institution.
Alors, vous avez essayé de tourner autour du pot. Vous avez été long. Il est vrai que je me répète beaucoup avant d’obtenir de vous, pas sous la torture, peut-être un peu psychologique, admettons-le, l’aveu du recours à l’emprunt.
Nous avons beaucoup évoqué, Monsieur le Président, le parallélisme qui existe entre les dispositions de notre règlement intérieur, que je vous ai lues, et celles de l’article 40 de la Constitution. Un de mes excellents collaborateurs s’est procuré pendant la nuit ce document du service de la séance du Sénat, institution tout à fait respectable, qui s’appelle « la rédaction des amendements, sous-amendements et motions de procédure ». Je vois beaucoup d’indications relatives à l’application de l’article 40 de la Constitution, qui est très exactement, à peu de choses près, ce qui figure dans notre règlement intérieur. Sur la rédaction des gages, le gage doit mentionner explicitement la personne publique affectée par la perte de recettes. Il y a des recommandations s’agissant des gages pour l’État, pour les organismes de Sécurité sociale et des gages pour les collectivités territoriales. S’agissant des gages pour les collectivités territoriales, qui sont la compensation des amendements comportant une augmentation de dépenses, il est dit ceci : « Lorsque la mesure proposée est une faculté laissée à la libre décision des collectivités concernées, la compensation porte sur une majoration de la fiscalité locale ».
Certes, vous allez me dire que c’est le droit parlementaire et c’est quand les parlementaires s’occupent des collectivités locales. Il n’en reste pas moins que le Sénat nous donne là, Monsieur le Président, Monsieur le Vice-président, un exemple de grande sagesse, dont vous n’avez tenu aucun compte puisque vous intégrez les amendements de votre majorité et vous les faites financer par l’emprunt d’équilibre qui augmente de ce fait de 5 millions d’euros, portant à quelque 300 millions d’euros. Vous me direz que c’est moins que l’année dernière. Certes, mais cela va quand même s’ajouter à l’emprunt d’équilibre de l’année dernière. D’emprunt d’équilibre en emprunt d’équilibre, on arrive à un total déséquilibre de nos finances.
Pour conclure, je dirais que vous allez sans doute vous prévaloir de cette relative stabilité de la dépense, mais celle-ci se présente dans une situation où la Région dépense vingt fois ce qu’elle dépensait quand je suis arrivé pour la première fois dans cette institution. Il est vrai qu’il y a plus d’un quart de siècle. Vous me direz que les compétences ont augmenté depuis, mais elles n’ont pas augmenté dans les mêmes proportions. En tout cas, les services aux citoyens n’ont pas augmenté du tout dans les mêmes proportions. Le fait par conséquent de maintenir un boulimique au même niveau de consommation que précédemment, c’est persévérer dans un déséquilibre néfaste à sa santé.
Le groupe Front National n’approuvera pas cette voracité permanente.
Je vous remercie.
Bruno Gollnisch rejète le budget de la Région… par FNRhoneAlpes