Intervention de Charles Perrot – 14 décembre 2011
Rapport n° 11.12.776
Monsieur le Président,
Nous voilà donc parvenus au terme du travail de cette mission et comme on pouvait s’y attendre et même si les travaux conduits l’ont été dans un certain respect, une certaine courtoisie, certes, parfois à fleuret moucheté, les conclusions proposées en page 435 auraient pu être énoncées et d’ailleurs elles l’ont été souvent, dès avant même la première réunion de cette mission.
L’intérêt quand même de cette mission aura été de mettre des chiffres précis sur les coûts induits par les transferts de compétences issus de la loi de 2004, tant en dépenses qu’en recettes, et de couper court aux extrapolations antérieures, abracadabrantesques comme dirait l’autre.
Comme j’ai le privilège d’être le premier à intervenir sur ce dossier, je ne vais pas m’empêcher de vous annoncer la suite. La suite, c’est donc ce qui va se passer dans les instants qui viennent avec les orateurs qui me suivront. Que va-t-il donc se passer ?
Sans grand risque de me tromper, nous allons donc assister à une partie traditionnelle de ping-pong entre votre majorité, Monsieur le Président, et votre opposition dite de droite. Affrontements coutumiers, traditionnels dans cet hémicycle, stériles bien souvent, mais appréciés bien sûr par les commentateurs et les échotiers qui rendront ainsi à l’opinion publique l’image de cette bipolarisation politique apparente du paysage politique régional, bipolarisation théâtrale savamment entretenue parce que bien évidemment nécessaire à la sauvegarde de vos intérêts politiques croisés.
Nous allons donc assister à de brillantes démonstrations, à des coups de mentons, à des effets de manche, les chiffres avancés par vous, Monsieur Jouve, seront réfutés évidemment. Le vilain État UMP pour la Gauche sera réputé vertueux par la pseudo-droite. La TIPP, bien sûr, dans son double mécanisme, partie fixe, partie modulable, double mécanisme très complexe, Monsieur Jouve vous avez parlé d’un monument de complexité, c’est vrai, eh bien cette TIPP va être au coeur des discussions et des calculs et nous allons assister, je le crains, à une véritable querelle de boutiquiers.
Pour notre part, nous retiendrons deux enseignements de ce rapport. Nous prenons vos chiffres, Monsieur Jouve, et les chiffres de la commission pour effectivement la réalité d’une situation donnée avec un travail qui a été effectivement considérable des services et nous pouvons tous les remercier.
Premier enseignement, lorsque l’on tire le trait final des soldes positifs et négatifs, le manque à gagner pour notre collectivité s’établit à 72 M€. C’est effectivement ce que vous venez de préciser à l’instant, 72 M€ cumulés sur 6 exercices budgétaires, 2005 à 2010,soit une moyenne sur 6 ans de 12 M€. Quand même, rapporté à un budget annuel moyen de 2 Mrds€ sur la période, c’est moins de 0,5 %, c’est 0,44 % du budget total, ce qu’en d’autres temps on dirait c’est l’épaisseur d’un trait de plume.
Franchement, Monsieur le Président, et objectivement, parvenir in fine à un solde, certes négatif en défaveur de la Région, mais malgré tout modeste, qu’on dirait d’ailleurs dans des analyses bilancielles, NS, non significatif, devant la complexité des calculs qui ont permis d’établir ce chiffre, confirme que l’architecture de ces transferts et de leur compensation financière sont pratiquement en phase. Croyez-moi, je ne suis pas fondamentalement enthousiaste de devoir dresser ce constat, mais je le crois, je le dois à l’objectivité qui est la mienne.
Deuxième enseignement, et Monsieur Jouve je vous rejoins totalement et c’est de mon avis le point le plus important, ce rapport nous montre que depuis 2005 les Régions ont perdu pratiquement toute autonomie financière au fur et à mesure de ces transferts de compétences.
La question même de la compensation est devenue simplement anecdotique, obsolète car les Régions sont désormais sous dépendance du pouvoir central, certains ont même parlé de véritable tutelle et peut-être dans quelques années on parlera de curatelle. Voilà plus sûrement la réalité et l’enseignement majeur de ce rapport. L’État jacobin a repris la main, mais c’est dans sa nature.
Monsieur le Président, il redistribue les cartes et les Régions vont devoir vivre désormais dans l’illusion de leur autonomie et dans l’illusion de leur pouvoir de décision. Je vous souhaite bonne chance, Monsieur le Président.