par Hugues PETIT
Pour commencer, je tiens à dire que je joins très volontiers mon approbation à l’action de M. Jacot qui se démène beaucoup sur ces questions d’évaluation. À tel point d’ailleurs que, lorsque l’on siège dans plusieurs commissions, on a le plaisir de le retrouver dans chaque commission où il prend la peine de venir expliquer son dossier. Je n’en suis que plus à l’aise pour porter sur le principe même de la démarche trois critiques.
La première critique : il me paraît que, dans un régime démocratique, l’évaluation des politiques doit être faite par le peuple. Comme l’a dit un grand intellectuel français, académicien, « Une politique se juge par ses résultats ». Je crois qu’il est malsain de constater de plus en plus que l’on enlève la parole au peuple pour la donner à des experts. Je sais bien que l’on va me répondre que l’évaluation ne se situe pas dans le même domaine, mais vous me rendrez quand même cette justice : de plus en plus, on fait appel à des experts. Je crois que cela démontre, d’abord, une méfiance à l’égard du peuple, à l’égard de ses capacités de jugement. Ensuite, cela démontre une volonté de confisquer le pouvoir au profit de certains petits groupes.
Ma deuxième critique consiste à dire qu’il est assez malsain qu’une institution comme la nôtre paie des gens pour évaluer ce qu’elle fait. A priori, quand vous payez quelqu’un pour évaluer ce que vous faites, il y a de bonnes chances qu’il ait un préjugé assez favorable. D’ailleurs, on a pu le constater à un niveau beaucoup plus élevé concernant la crise qui a frappé d’abord les États-Unis. Chacun a pu voir que les grands organismes d’évaluation n’ont rien vu venir et qu’ils donnaient pratiquement à tout le monde les trois A, la meilleure note, pour finalement se rendre compte que les entreprises en question étaient extrêmement vulnérables.
Plus près de nous, le cas de Bernard Madoff. Cette personne a réussi à détourner 50 milliards de dollars au nez et à la barbe de tous les plus grands experts américains, puisqu’y compris la fameuse Securities and Exchange Commission, autrement dit le gendarme de la bourse américaine, n’a rien vu venir. Donc nous sommes extrêmement sceptiques sur la valeur des évaluations faites par ces experts.
Enfin, ma troisième observation (je l’ai déjà faite à M. Jacot, il s’en rappellera sans doute, à la commission des finances) porte sur le choix des personnes retenues pour faire ces évaluations. En effet, dans le second rapport sur lequel nous discutons, sont présentés les sept experts retenus. Pour l’essentiel, il s’agit d’universitaires, ce qui n’est pas fait pour me déplaire. Simplement, je voudrais faire observer que, concernant ces sept experts retenus, on aurait pu nous présenter d’autres noms que ceux-là. Des centaines d’autres noms auraient pu nous être proposées. Donc pourquoi avons-nous retenu ces sept-là et non les sept cents autres que l’on aurait pu retenir ?
Tout cela nous amène à porter un jugement globalement négatif sur ces opérations, quel que soit, je le répète, le mérite de M. Jacot qui prend cela très à cœur et qui prend bien soin de nous en informer.