Intervention de Liliane Boury (préparée par Dominique Martin) – 30 mai 2008
Rapport n° 08.02.369
Monsieur le Président,
En l’absence obligée de M. Martin qui m’a confié le texte de son intervention, je vous remercie d’accepter que je vous la lise.
Vous nous demandez aujourd’hui de prolonger de deux ans la convention signée le 12 mars 2007 validant le transfert de l’organisation et du financement des actions de formation de l’AFPA à la Région Rhône-Alpes, transfert imposé par l’application de la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales, une loi qui amplifie le processus de décentralisation entamé en 1983.
Autrement dit, nous subissons, comme en 1983, le désengagement de l’Etat pour des compétences qui le gênaient et qui continuent de le gêner, en l’occurrence la formation professionnelle, domaine des plus compliqués si l’on en juge à ses résultats en matière de lutte contre le chômage, comme en matière de création d’emplois.
On aurait pu espérer que ce transfert soit voulu et mûrement réfléchi, et qu’il cherche à unir deux compétences en vue d’obtenir une meilleure cohérence régionale tout en préservant une politique nationale en matière de formation : d’un côté l’AFPA, une association qui depuis 1949 était un outil stratégique de la politique nationale en matière d’emploi et de formation professionnelle, de l’autre la Région Rhône-Alpes qui, depuis 1983, s’est beaucoup investie dans le même domaine y consacrant une très grosse part de son budget. En réalité, il n’en est rien.
C’est ainsi que l’on retrouve dans la convention initiale toutes les orientations stratégiques de la Région ou, plutôt, de l’actuel Exécutif régional.
Le PRPE (Plan Régional Pour l’Emploi) voté le 19 novembre 2004 et ces 21 mesures que le Front National avait qualifiées d’accompagnement thérapeutique du chômage. 21 mesures en réalité soit démagogiques, soit intéressées, soit partisanes, nous avons pu le constater depuis.
Le PRDF (Plan Régional de Développement des Formations professionnelles) dont notre assemblée a adopté la refondation le 20 juillet 2006, ce qui nous avait permis de vous dire que cette “refondation du PRDF” donnait la terrible impression que vous découvriez le problème, plus de deux ans après votre élection.
Il est d’ailleurs précisé dans la convention initiale, article 2, point 2.3.3., intitulé “Missions et objectifs de l’AFPA en région”, que l’AFPA proposera : “chaque année en octobre de l’année N-1, un programme subventionnable s’intégrant dans les priorités de la Région.”
C’est donc très clair, ce transfert de l’organisation des actions de formation de l’AFPA à la Région Rhône-Alpes n’apporte ni cohérence nouvelle, ni efficacité renforcée puisque les objectifs et les outils restent les mêmes. Quant au transfert du financement Etat/Région, 43,415 M€ dès 2007, il s’avère n’être qu’un simple jeu d’écriture puisque, au final, la Région passe une commande à l’AFPA pour un montant équivalent.
Monsieur le Président, chers collègues, en 2006, lors de la délibération validant la première convention, nous avions prévenu que, comme dans toute décentralisation, le risque était grand que l’Etat, d’année en année, diminue ce transfert, alors que l’AFPA, elle, deviendrait de plus en plus gourmande.
C’est chose faite et vous le constatez hardiment page 10 de votre rapport, je vous cite : “les conditions et le cadre juridique de la décentralisation opérés par la loi du 13 août 2004 sont susceptibles de mettre en cause la survie de l’AFPA. En effet, la plus grande incertitude pèse sur les conditions d’emploi des crédits au-delà de l’échéance du 31 décembre 2008, sur le devenir des services associés, qu’il s’agisse de l’hébergement, de la restauration, de l’accompagnement des stagiaires et sur la gestion du patrimoine de l’association.”
CQFD, ce qu’il fallait démontrer, même si l’article 7 de la convention intitulé “Pilotage, suivi et évaluation” prévoit des “Tableaux de bord de suivi et de rendu compte”, ainsi qu’un “comité de pilotage et de suivi”. Sacré pilotage qui nous a emmenés droit dans le mur, et l’AFPA avec !
Monsieur le Président, chers collègues, ce transfert qui nous était présenté comme la solution est devenu une usine à gaz de plus, une usine déficitaire de surcroît. J’ose à peine vous le rappeler, tant c’est évident, l’unique, la seule solution passe par l’entreprise, car elle seule crée de l’emploi, elle seule transmet les savoir-faire, en restant à la pointe de la technologie.
Que la Région ne sache pas faire, passe encore, et ce n’est pas faute d’avoir prévenu, mais que cela coûte de plus en plus d’argent pour maintenir des structures rapportées par la force de la loi, cela n’est plus acceptable car, au bout du compte, ce sont toujours les Rhônalpins qui paient avec leurs impôts, impôts sans cesse en augmentation, alors que leur pouvoir d’achat ne cesse de diminuer.
Comme disaient nos anciens : “Charité bien ordonnée commence par soi-même”. C’est la raison pour laquelle nous n’accepterons pas cette prolongation ruineuse de convention.
Monsieur le Président, je vous remercie.