Intervention de Maurice Faurobert – 10 avril 2008
Rapport n° 08.06.243
Monsieur le Président,
Ce schéma avec cinq orientations cadres, 17 finalités et 60 objectifs représente environ le quart du budget annuel régional. C’est évidemment un élément important de votre politique qui risque de peser lourdement sur la vie et l’avenir de nos concitoyens. A vrai dire, c’est beaucoup de moyens pour continuer à faire rouler des trains, l’ambition est donc ailleurs, beaucoup plus vaste et politique.
Vous voulez un projet qui se différencie du Schéma Régional des Transports et du Schéma des infrastructures et vous voulez plus de services aux usagers. Ceci, selon vous, afin d’être plus près des besoins des Rhônalpins, du développement durable, d’agir pour le report modal, pour l’environnement et bien sûr contre le réchauffement climatique, pour faire des économies d’énergie, pour promouvoir la mobilité des personnes et même maîtriser les prix du foncier par l’influence sur l’urbanisme. Cerise sur le gâteau sans doute, la gouvernance est là entourée de tout ce vocabulaire magique pour une communication selon la sensibilité du moment.
Toutefois, la réalité des Rhônalpins est tout autre, c’est toujours plus de déplacements et de problèmes de transport. Dès le collège, les enfants doivent passer trop de temps dans les transports en commun, ensuite voyager trop loin pour étudier, quitter l’aide et le logement familial trop tôt et aller chercher de plus en plus loin un emploi de plus en plus précaire. Souvent, ils se contentent d’un logement trop loin, trop exigu ou trop cher. Géographiquement écartelées, les familles se dissolvent, nos concitoyens sont transformés en nomades et parfois en nomades mendiants. Ils sont constamment soit à la recherche d’un emploi, soit à la recherche d’un logement et trouvent rarement sur le même lieu.
Certes, avec le saupoudrage d’aides diverses et de subventions sociales multiples, ils ne se rendent pas toujours compte du scandale de cette situation, scandale d’un pays encore riche de potentialités, même s’il est la ruine financière et si les dirigeants abandonnent le peuple aux intérêts mercantiles et politiciens.
Cependant, les moyens de transport se multiplient et les nuisances aussi. On va donc toujours plus vite et plus loin selon l’incontournable culte de la mobilité, mais sans diminuer les inconvénients ni la paupérisation du pays. La demande progresse toujours sans apporter l’enrichissement qui devrait l’accompagner et l’on ne voit pas non plus que la contrainte des déplacements permet une plus grande liberté des personnes. Nous constatons là un déséquilibre et un préjudice flagrant.
Vous admettez que la globalisation de l’économie contribue à un accroissement des flux de marchandises et des voyageurs. La recherche sans frein au niveau mondial du moindre coût trouve des potentialités de production énormes chez les pauvres et une consommation gloutonne chez les autres. Plus rien ne venant modérer ou contrôler cette frénésie, il s’ensuit une nécessité toujours croissante de transporter des marchandises entre les uns et les autres, soit du sud vers le nord.
Toute la classe politicienne favorise ce phénomène de mondialisme. A Droite comme à Gauche, c’est la complicité de l’exploitation du pauvre qui doit consentir le plus grand sacrifice pour survivre. C’est ainsi que le coût du transport est indolore quand le prix d’achat est 100 fois inférieur au prix de vente ; cet esclavagisme, lui, est 100 fois moins excusable que celui de l’antiquité.
Cette immense foire au moindre coût est un phénomène qui s’impose chaque jour davantage tant aux pays consommateurs qu’aux pays producteurs. Ainsi, la France sans protection vis-à-vis de cette concurrence doit fermer ses entreprises ou les délocaliser afin de fuir la fiscalité intérieure et de bénéficier ailleurs des populations que l’on ose dire en développement. C’est ainsi que nous n’avons pratiquement plus d’agriculture, plus de textile, plus de métallurgie, presque plus de pêche, etc.
C’est dire les transports que cela engendre pour l’approvisionnement, mais ce sont également des déplacements nouveaux de la part des employés licenciés, des déménagements et des familles partagées, ce qui entraîne encore des déplacements. Il ressort de ces constats que pour diminuer les motifs de transport et de déplacement, il faut nécessairement se mettre à l’abri de la pression mondialiste.
C’est en recréant des activités variées et pérennes, judicieusement réparties sur le territoire, que nous éviterons beaucoup de déplacements. Naturellement pour émerger, ces activités ont besoin d’être raisonnablement protégées de la concurrence sauvage du monde entier et c’est une politique du bien commun national qu’il faut promouvoir. Certes, il faut une volonté forte, mais la survie de notre économie, de notre peuple, comme l’indépendance de notre politique des transports est à ce prix.
Vous pensez jouer un rôle d’organisation des flux de marchandises, en particulier sur les grands itinéraires européens en reportant une partie de ce qui est transporté par la route vers le ferroviaire et le fluvial. C’est évidemment nécessaire dans la vallée du Rhône, mais sans disposition pour reconquérir nos marchés et relancer l’activité, sans disposition pour percevoir une taxe sur les trafics internationaux qui permettraient de contrôler le trafic, entretenir et améliorer nos structures, vous ne ferez que faciliter le système mondialiste décrit plus haut et qui nous fait disparaître.
Par ailleurs, nous constatons un manque de réalisme dans ce schéma car plus de 80 % de nos concitoyens qui se déplacent avec leurs propres moyens individuels sont ignorés. Ou plutôt, on se félicite scandaleusement de leurs difficultés nouvelles comme le prix exorbitant du carburant, la multiplication des radars, l’engorgement des entrées de ville et les verbalisations. Or, dans l’équipement routier le contournement ouest de Lyon, l’A89, l’A51 Gap-Sisteron sont des priorités régionales indispensables même pour les liaisons au-delà de la région.
Considérant que ces derniers points doivent être amendés, nous réservons la décision de notre vote.